HOLLYWOOD – L’histoire tourne principalement autour des âmes – comment les garder entières et le degré de mal requis pour les séparer en deux. Après la chute de l’un des héros au-delà du voile de la vie, on peut encore l’entendre murmurer. Cela part du principe que l’amour peut vous sauver de la mort et finit avec une proclamation selon laquelle un sacrifice fait au nom de l’amour peut vous ramener d’entre les morts.
Harry Potter est suivi par des elfes de maison et des gobelins – non pas des esclaves – mais pour le lecteur attentif, les parallèles bibliques sont frappants. L’auteur des livres Harry Potter J.K. Rowling a toujours incorporé explicitement des thèmes religieux et des questions dans son œuvre, mais jusqu’à Harry Potter et les Reliques de la Mort, ils ne s’étaient jamais rapportés à une religion en particulier.
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“C’était mon intention depuis le début”, a signalé Rowling aux journalistes durant une conférence de presse qui a eu lieu au début de son “Open Book Tour” lundi dernier. Elle n’a pas agi ainsi parce qu’elle avait peur d’insérer des thèmes religieux dans une histoire pour enfants. Au contraire, elle craignait qu’en introduisant des concepts religieux (le christianisme en particulier), cela en dévoilerait trop aux fans susceptibles de s’apercevoir des parallèles.
“Pour moi, les parallèles religieux ont toujours été évidents”, a-t-elle expliqué. “Mais je n’ai pas voulu en parler trop ouvertement parce que je pensais que cela pourrait montrer aux personnes qui voulaient suivre l’histoire en temps voulu où nous allions.”
En effet, dans sa version la plus simplifiée, le dernier récit des aventures de Harry peut se résumer à celui d’une résurrection, Harry se rendant dans une station conduisant au royaume céleste après avoir été la cible d’un sortilège de la mort dans le 35ème chapitre, pour revenir au monde des vivants tout de suite après.
Mais si elle s’est plus souciée de la narration dans les 6 premiers livres, elle ne l’était clairement plus lorsque Harry se rend sur la tombe de ses parents dans le chapitre 16 des Reliques de la Mort, intitulé “Godric’s Hollow”. Sur la pierre tombale de ces derniers, il lit la citation, “Le dernier ennemi qui sera détruit, c’est la mort.”, alors que sur une autre pierre tombale (celle de la mère et de la sœur de Dumbledore) il lit, “Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur.”.
Alors que Rowling affirme que “Poudlard est une école aux multiples fois”, ces citations sont chrétiennes. La seconde est une citation directe des propos de Jésus dans Matthieu 6:21 et la première est tirée de 1 Corinthiens 15:26. Tout comme Hermione l’explique rapidement à Harry après qu’il ait lu les gravures, le message sur la tombe de ses parents signifie “vivre au-delà de la mort. Vivre après la mort.”. Il s’agit de l’une des bases fondamentales dans la théologie de la résurrection.
“Ce qui s’insère parfaitement dans l’histoire de Harry”, a dit Rowling qui parlait pour la première fois de ces citations.
“Ces livres ont un caractère très britannique, donc d’un point de vue pratique Harry allait forcément trouver des citations bibliques sur les pierres tombales”, explique Rowling. “Mais je pense que ces deux citations en particulier qu’il découvre à Godric’s Hollow résument – symbolisent pratiquement la série toute entière.”
En tant que celui qui doit réunir les trois Reliques de la Mort, Harry devient en fait le “Maître de la Mort” à la fin du roman, étant dans la possibilité de ramener à la vie les esprits de ses parents, de son parrain Sirius Black et de son ancien professeur Remus Lupin. C’est une conclusion qui met un terme au questionnement qui s’étend sur trois livres de Harry concernant l’après-mort, qui débute Sirius passe à travers un voile reliant le monde des vivants et celui des morts à la fin de l’Ordre du Phénix.
Le livre Les Reliques de la Mort commence lui-même avec deux épigraphes teintées de religion, l’une étant tirée de The Libation Bearers d’Aeschylus et l’autre des Fruits de la Solitude de William Penn. Aucun autre tome de la série ne commence avec des épigraphes – fait curieux mais Rowling insiste sur le fait qu’elles lui ont servi de guide.
“J’ai vraiment aimé choisir ces deux citations parce que l’une est païenne, bien sûr, et l’autre fait partie de la tradition chrétienne”, dit Rowling à propos de leur insertion. “Je savais que je choisirai ces deux passages depuis que le deuxième tome, ‘La Chambre des Secrets’, avait été publié. J’ai toujours su que si je pouvais les utiliser au début du septième livre, je pourrais conclure la série parfaitement. S’ils étaient appropriés, alors j’irai là où j’avais besoin d’aller.”
“Ils disent tout pour moi, vraiment”, a-t-elle ajouté.
Mais alors que le livre commence par une citation se rapportant à l’immortalité de l’âme – et bien que Harry trouve finalement la paix avec sa propre mort à la fin de son voyage – c’est la lutte du héros en elle-même qui reflète celle de Rowling, explique l’auteur.
“La vérité c’est que, comme Graham Greene, j’ai parfois foi dans le fait que ma fois va se raviver. C’est une chose avec laquelle je lutte énormément”, a-t-elle révélé. “Si vous me demandez à un moment donné si je crois en la vie après la mort, je pense que si vous me le demandiez plusieurs fois d’une manière régulière dans la même semaine, je pense que je répondrais plus souvent oui que non – que je crois en la vie après la mort. Mais c’est une chose avec laquelle je lutte souvent. Cela me préoccupe beaucoup et je crois que cela ressort dans les livres.”
Le fait que, l’auteur le reconnaissant elle-même, Harry Potter contienne des thèmes chrétiens peut être ironique en quelque sorte, considérant le fait que de nombreux leaders chrétiens ont accusé la série de démystifier la sorcellerie et de la rendre acceptable. Alors qu’il n’étaient encore connu que comme le Cardinal Joseph Ratzinger, le Pape lui-même a condamné les livres, écrivant que leur “manière subtile de séduire, qui agissait sans que l’on s’en rende compte … déformait profondément le christianisme dans l’âme avant qu’il ne puisse grandir correctement.”
De son côté, Rowling a déclaré qu’elle était fière que son œuvre fasse partie de la liste des nombreux livres interdits. Et concernant les protestations de certains croyants ? Hé bien, elle ne leur prête pas attention.
“Je vais moi-même à l’église”, a-t-elle déclaré. “Je ne suis pas responsable des frivolités lunatiques de ma propre religion.”