2e journée du procès “Lexicon” : Steve Vander Ark témoigne

Alors que Vander Ark, un ancien libraire du Michigan âgé de 50 ans, se présentait à la barre ce matin [ndlr : mardi 15 avril 2008] dans l’affaire opposant J.K. Rowling et Warner Bros. à RDR Books, c’est ce sujet – quel est vraiment le but du Lexicon – qui était au centre de la discussion. À 50 ans, Vander Ark paraît bien plus jeune que son âge. Il porte des lunettes qui lui donnent un air enfantin et est coiffé avec une raie au milieu de ses cheveux, étant loin d’être chauve. Il parle avec un ton de voix doux, un ton de libraire, comme s’il lisait un livre à un groupe d’enfants. Quelques fans de Harry Potter qui étaient assis derrière les membres du Law Blog dans l’assistance ont fait remarquer que Vander Ark ressemblait à un petit Harry lui-même, et, bien que nous n’aurions pas osé faire cette comparaison nous-mêmes, nous devons dire que nous sommes d’accord.

Voici le récit de l’effondrement de Vander Ark durant son témoignage, qui s’est avéré plus long que celui de Rowling :

Le Lexicon apporte-t-il des éclairements supplémentaires [au sujet de l’œuvre de J.K. Rowling] ?

Dans son témoignage d’hier, Rowling avait affirmé et démontré que le Lexicon n’avait pas grand intérêt pour les fans à être publié puisqu’il ne s’agissait que d’une réorganisation alphabétique de son travail, comprenant beaucoup d’inexactitudes dans les explications qu’il donne, problème auquel il faut remédier. Mais aujourd’hui, quand l’avocate de Rowling, Dale Cendali, a demandé à Vander Ark s’il pensait que son Lexicon était une “copie” ou non de l’œuvre de Rowling, il a en quelque sorte éludé sa question en répondant : Il s’agit d’un livre de référence pour une œuvre littéraire, donc, c’est tout naturellement qu’il se réfère à la source… Nous utilisons des expressions identiques ou néanmoins similaires à celles que l’ont peur trouver dans le livre à certains endroits.

Quand ce fut le tour de l’avocat de RDR, David Hammer, d’interroger Vander Ark, il s’est penché un peu plus sur la question. Quand on lui a demandé quelle était la valeur principale du Lexicon, Vander Ark, empruntant un terme utilisé dans sa propre profession, l’a qualifié de référence disponible ayant des qualités de synthèse où vous pouvez rapidement trouver des informations concernant le vaste univers de Harry Potter.

Vander Ark a-t-il violé les droits de Rowling et de Warner Bros. en connaissance de cause ?

Cendali a tenté d’évoquer le fait que, en tant que libraire de longue date, Vander Ark devrait avoir une certaine connaissance des lois qui entourent le droit de copie et qu’il savait peut-être à l’avance que RDR avait pour intention de violer les droits de Rowling. Cendali a fait part d’un e-mail à l’audience, envoyé par Vander Ark au membre d’un site internet de fans de Harry Potter. Vander Ark, apparemment déçu par le contrat qu’il avait obtenu avec RDR en août, avait écrit : J’ai plus qu’envie de rompre mon contrat avec RDR. Ils m’ont menti, m’ont trompé, se sont servis de moi et ont finalement ruiné mes relations avec les fans et avec Rowling.

Qu’est-ce qui est le plus important pour les deux parties ? L’argent ou la passion ?

Rowling disait hier que cette affaire n’était pas une histoire d’argent mais de principe. L’un des avocats de RDR, Anthony Falzone, expliquait dans son introduction que Vander Ark n’avait jamais songé à l’argent mais qu’il avait rédigé le Lexicon par passion [pour l’œuvre de Jo]. Nous avons aujourd’hui un aperçu de ce qui motive les deux antagonistes. Selon Vander Ark, il aurait touché 6500$ grâce à son site internet – uniquement à l’aide des publicités – entre 2000 et 2008.

Mais la partie la plus révélatrice du témoignage de Vander Ark a été la fin de l’interrogatoire principal de Hammer. Alors qu’on lui demandait s’il se considérait comme faisant partie de la communauté des fans de Harry Potter – ceux qui, selon Vander Ark, dévouent la plupart de leur temps libre à tout ce qui touche à Harry Potter – il a respiré avec difficulté avant de répondre, “Oui, j’en faisais partie”. Puis, pratiquement harassé de questions à ce sujet, il a changé sa réponse en “Oui, j’en fais partie” puis a fondu en larmes.

Hammer lui a ensuite demandé pourquoi cette question “évoquait autant d’émotions” chez lui. Retrouvant son calme, et essayant difficilement de ne pas regarder J.K. Rowling, la table des plaintifs se trouvant directement en face de la barre, Vander Ark a répondu, Cela a été difficile pour moi parce que j’ai été largement critiqué et cela n’a jamais été mon intention. Je comprends pourquoi cela est arrivé, mais c’est difficile pour moi. Le ‘Lexicon’ a occupé une part importante dans ma vie durant ces 8 à 9 dernières années, et voilà où ça me mène aujourd’hui…

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Quelle décision le Juge Robert Patterson va-t-il prendre concernant l’affaire ?

Si tout cela ne tenait qu’à lui, il n’en prendrait aucune. A la fin de la seconde journée de témoignage, il a appelé les parties au calme.

Le Juge Patterson a retiré ses lunettes et s’est adressé à la cour. “Le fait que cette affaire repose plus sur les dires des avocats que ceux de leurs clients me préoccupe”, s’est-il lamenté. “Nous avons d’un côté ceux qui invoquent la doctrine du « fair-use » et de l’autre une grande société. Il serait préférable que les parties trouvent un terrain d’entente parce que cette affaire soulève des questions importantes et le résultat pourrait être en faveur des plaignants comme de la défense. La doctrine du « fair-use » n’est pas claire.

Je vous en fait part maintenant afin que vous puissiez y réfléchir avant que nous ne poursuivions le procès”, a-t-il ajouté. Peut-être est-il déjà trop tard ; peut-être sommes-nous déjà allés trop loin pour revenir en arrière. Mais un accord à l’amiable est préférable à un procès.

L’appel a été fait alors que l’un des avocats de l’accusation, Marvin Putnam d’ O’Melveny, contre-interrogeait un témoin, un échange qui frustrait et faisait apparemment perdre patience à l’avocat. Le Juge est intervenu à un certain moment pour faire remarquer qu’il était déjà seize heures et a demandé à Putnam s’il en avait encore pour longtemps. Putnam s’est excusé et lui a répondu qu’il en avait encore pour un certain temps.

Il s’agissait de l’un des deux témoins à passer à la barre durant l’après-midi qui parlait de l’impact que la version imprimée du Harry Potter Lexicon de Vander Ark aurait sur le marché, et comment il affecterait la vente d’une encyclopédie Harry Potter similaire que J.K. Rowling avait l’intention d’écrire.

L’expert en édition appelé par les plaignants, Suzanne Murphy, la vice-présidente du commerce de l’édition chez Scholastic – l’éditeur américain officiel de Rowling – a attesté qu’en plus du fait qu’elle pensait que le Lexicon de Vander Ark était de “basse qualité”, elle pensait également qu’il “avait le potentiel de se vendre plutôt bien. Ce témoignage avait pour but de démontrer que le Lexicon avait le pouvoir de compromettre la vente du travail de Rowling.

Puis, c’était au tour de la défense de faire appel à son expert en édition, un certain Bruce Harris qui travaille dans l’industrie de l’édition depuis longtemps et qui a passé la majeure partie de sa carrière à Crown, Random House et Workman Publishing. Harris a attesté que, selon sa connaissance du marché et du travail de Rowling, qu’il qualifie d’auteur ayant eu le plus de succès du 21ème siècle, il y a peu de chance pour que le Lexicon de Vander Ark – dont, a-t-il dit, 1500 copies pourraient peut-être se vendre – mette en danger la vente de l’encyclopédie de Rowling. Son dernier roman, Harry Potter et les Reliques de la Mort, s’est vendu à 13 millions d’exemplaires pour un total de 250 millions de dollars, a affirmé Harris, se basant sur son étude des archives de Scholastic.

Portolien

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