Le journaliste Dave Bruno, dans le magazine chrétien « Christianity Today », donne l’origine biblique des épitaphes gravés sur les tombes dans le cimetière de Godric’s Hollow mais aussi quelques pistes de lecture…
L’une des plus grandes révélations de ce septième tome est la suivante: le grand directeur de l’école de sorcellerie Poudlard, Albus Dumbledore lisait la Bible ! En effet, Albus Dumbledore cite la Bible mot pour mot lorsque nous apercevons les inscriptions que celui-ci a fait graver sur la tombe de sa mère et de sa soeur: “Where your treasure is, there will your heart be also.” (“Où est ton trésor, là sera aussi ton coeur”).
Mais voici le passage entier issu de la Bible, Matthieu, 6: 19-24:
« Ne vous amassez point de trésors sur la terre, où la mite et le ver consument, où les voleurs percent et cambriolent. Mais amassez-vous des trésors dans le ciel : là point de mite ni de ver qui consument, pas de voleurs qui perforent et cambriolent. Car où est ton trésor, là sera aussi ton coeur. »
« La lampe du corps, c’est l’oeil. Si donc ton oeil est sain, ton corps tout entier sera lumineux. Mais si ton oeil est malade, ton corps tout entier sera ténébreux. Si donc la lumière qui est en toi est ténèbre, quelles ténèbres! »
« Nul ne peut servir deux maîtres: ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et l’Argent. »
Certains ont noté que Harry et Hermione ne semblent pas savoir que l’épitaphe vient de la Bible. Rowling dit à ce sujet que «Harry ne comprenait pas ce que signifiait cette phrase.» Et à ce niveau de lecture, les lecteurs ne comprennent pas non plus. Mais il paraît clair que Dumbledore connaissait exactement le sens profond de ce verset et l’a choisi intentionnellement.
Pourquoi Dumbledore a-t-il choisi ce verset issu du Sermon sur la Montagne pour la tombe de sa famille? Les circonstances de la mort de sa soeur nous aident à mieux comprendre. L’attirance malsaine de Dumbledore (bien que drappée de bonnes intensions) pour les reliques les plus puissantes ayant jamais existé, les Deathly Hallows ont finalement conduit à la mort de sa soeur. Cet événement fait de la soeur de Dumbledore, Ariana, l’un des personnages les plus tragiques de toute la saga Harry Potter. Sa vie n’a été qu’immense souffrance, exprimant un besoin partagé par tous ceux qui souffrent de la sorte: elle avait infiniment besoin d’amour. D’amour sacrificiel. Et Dumbledore a échoué face à cette demande. Il était incapable de remplir son devoir en s’occupant d’elle et a préféré poursuivre son ambition de pouvoir. C’est cet échec, qui a conduit à la mort de sa soeur mais a permis à Dumbledore de comprendre une autre des réflexions de Matthieu « Nul ne peut servir deux maîtres » (Matthieu 6:24). Le pouvoir, même recherché pour une bonne cause ne peut conduire qu’à notre perte. Et Dumbledore le dit lui-même. Lui qui était le sorcier le plus puissant de son époque, “ne devait pas se voir confier le pouvoir”.
Et c’est le même conflit intérieur qui anime Severus Rogue. Il a tenté de servir deux maîtres: son amour pour la mère de Harry, Lily Evans, et sa quête de puissance. « Il s’attachera à l’un et méprisera l’autre » et c’est finalement l’amour qu’il portait à Lily qui était son véritable maître.
Comment pouvons-nous affirmer cela avec certitude? La réponse se trouve dans leurs yeux. Et encore une fois, Matthieu nous le confirme. Nous savons que Harry a hérité des yeux de sa mère. Des yeux vert émeraude. La saga ne nous le rappelle que trop. Et combien de fois nous dit-on que Rogue regarde Harry dans les yeux ? Nous croyons toujours y voir de la haine, mais en réalité ce sont les yeux de Harry qui réveillent le conflit. Rogue voit en ces yeux verts ceux de Lily Evans. Et Harry représente tout ce qu’il ne peut avoir : l’amour de Lily et le pouvoir. Harry lui rappelle sans cesse ce que lui coûte son renoncement à la magie noire. Dans the Deathly Hallows nous voyons les yeux noirs de Rogue rencontrer ceux de Harry avant que le maître des potions ne meure : «The green eyes found the black, but after a second, something in the depths of the dark pair seemed to vanish.» («Les yeux verts rencontrèrent les noirs, mais une seconde après, quelque chose dans les yeux sombres sembla disparaître.»)
Ce qui nous renvoie encore une fois à l’Evangile selon Saint Matthieu, «Si donc la lumière qui est en toi est ténèbre, quelles ténèbres !» (Matthieu 6:24). Dumbledore a dû promettre de garder le silence sur le plus grand secret de Rogue: «My word, Severus, that I shall never reveal the best of you ?» L’amour n’est pas une aliénation. L’amour ne peut pas être caché par les ténèbres comme un noir secret. Si l’amour est recouvert de ténèbres, quelles ténèbres en effet…
De même, lorsque Lily et Harry se regardent dans les yeux (chapitre “The Forest Again”, lorsque Harry utilise la pierre de résurrection, ndlr), ils voient en l’autre le sacrifice d’amour que chacun a fait (rappelons que Harry fait la démarche de se rendre volontairement à Voldemort, ndlr) . Chacun voit la plénitude dans le regard d’amour “sincère” de l’autre.
« La lampe du corps, c’est l’oeil. Si donc ton oeil est sain, ton corps tout entier sera lumineux. » (Matthieu 6:22).
Mais Dumbledore cite la Bible à un autre endroit.
Après que Harry et Hermione ont découvert la tombe de la mère et de la soeur de Dumbledore, ils trouvent celle des parents de Harry. Sur cette pierre tombale aussi figure un épitaphe et une autre citation de la Bible: «The last enemy that shall be destroyed is death» (« Le dernier ennemi à détruire, c’est la mort ») (Premier épître aux Corinthiens 15:26). Il est probable que Dumbledore soit également à l’origine de ce choix d’inscription. Le passage cité se réfère à la crucifixion et à la résurrection de Jésus qui détruit la mort. Rowling via Dumbledore aurait pu inscrire n’importe quoi sur la tombe des Potter, alors pourquoi citer la Bible? Je l’imagine trop consciencieuse, en tant qu’écrivain pour oser une telle référence sans que cela soit parfaitement délibéré.
Encore une dernière chose. Certains critiques chrétiens de l’oeuvre de Rowling prétendent que l’écrivain n’est pas très claire lorsqu’elle s’aventure sur le sujet de ses convictions sur l’au-delà. Ce qui est intéressant c’est que cette critique est souvent formulée par des lecteurs chrétiens qui apprécient Harry Potter mais ont le sentiment que le sujet de l’Eternité est sous-développé. Certes il y a des fantômes, oui une part des sorciers vit dans leurs tableaux et photos, c’est vrai qu’il y a une pierre de résurrection qui, en quelque sorte, ramène les morts à la vie ; le fameux chapitre « King’s Cross » dans the Deathly Hallows a même des airs de paradis, mais il me semble cependant, que tout comme Jésus dans le Sermon sur la Montagne, Rowling s’intéresse bien plus à l’aspect terrestre de l’Eternité.